Un peu plus âgée qu’Aline et Anne Marie, un peu moins que Jean René j’ai toutefois moi aussi des souvenirs d’école qui commencent à dater… C’est vrai qu’on ne badinait pas à ce temps là : A l’école, les claques, les humiliations, les maltraitances physiques et psychologiques n’étaient pas rares. On vivait nos heures scolaires dans l’angoisse : peur du maître ou de la maîtresse, peur des autres enfants en récré, peur de la réaction des parents le soir en rentrant quand il fallait expliquer le pourquoi du zéro. La bienveillance n’était pas de mode. Quand on était nul en classe, on était nul en tout. On confondait allègrement compétences intellectuelles et connaissances scolaires. On ignorait tout des dyslexies, des dysorthographies, des dysphasies et autres troubles : Le gamin était nul, on lui disait, il le croyait.
Mais ça c’était il y a longtemps. A l’école, on ne tape plus sur les enfants.
Aline, Anne Marie et Jean René ont passé plus de 40 ans de leur vie sans pouvoir lire: des accidentés de l’école comme ils disent. Une vie de secrets, de cachotteries, de supercheries, de dépendances, de limitations, de contournements. Une vie de rancœur, de blessures, de troubles psychiques, de phobies, de mauvaises pensées.
Mais ça c’était il y a longtemps : à l’école on n’humilie plus les enfants.
Aujourd’hui ces trois là ont fait peau neuve. Quelle magnifique résilience ! Président de l’association Addeski (réapprendre en Breton) à Morlaix, Jean René Mahé a été élu Breton de l’année aux victoires de la Bretagne. Aline Leguluche a écrit son livre « J’ai appris à lire à 50 ans » et est porte parole du programme national de lutte contre l’illettrisme des femmes, « Write her future » et enfin, la méthode d’apprentissage de l’orthographe d’Anne Marie Guignard aide de nombreux apprenants . Aujourd’hui Aline, Anne-Marie et Jean-René lisent et aident à lire. Ces trois là ont trouvé en eux la force et le courage, parfois bénéficié d’un peu d’aide aussi mais l’école, elle, n’a rien fait pour eux.
Alors moi, ma résilience, je devrais la commencer aujourd’hui!
Je devrais bien me garder de flâner sur les sites de parents d’enfants en difficultés d’apprentissage, je devrais éviter soigneusement les forums de parents d’enfants dyslexiques et je devrais effacer au plus vite de ma mémoire le souvenir des parents désemparés et des enfants meurtris que je n’ai pas réussi à aider pendant ma carrière d’enseignante…
L’école malveillante, négligente, impotente… était-ce il y a longtemps, vraiment?
Émission « Ça commence aujourd’hui – Ils ont appris à lire à 50 ans » du 13/01/2021 sur France 2.
Ne serait-on pas passé de la violence à la négligence ?
Est-ce que cela ne concerne que la lecture ?
Où se trouvent les frontières de la discipline et du respect de l’enfant ?
Il y a tellement à dire et à remettre en question, alors même que notre pays forme des élites dans toutes les disciplines, nous laissant penser que notre système est bon. Mais là, c’est un problème de fossé qui se creuse avec pour origine la capacité ou non, des parents, à aider leurs enfants le soir à faire leurs devoirs, et à faire face aux coûts d’un système pas si gratuit que ça.
« l’égalité des chances » est une belle formule mais bien évidemment on est encore loin du but à atteindre… Néanmoins l’école pour tous reste, selon nous, le meilleur creuset pour cette égalité, mais ne faudrait-elle pas qu’elle devienne en même temps que l’école de tous, l’école de chacun? Et oui, vous avez sûrement raison l’affaire ne se limite pas aux murs de l’école.
Preuve s’il en est que le regard des adultes est déterminant dans les apprentissages.
Aujourd’hui aussi sans doute on fait sûrement encore des erreurs en toute bonne foi.
Pour quelques uns qui ont pu réussir à s’en sortir – à quel prix et combien de temps- combien n’ont pas pu ?
L’école et la famille aussi pourraient elles s’appliquer ensemble à accompagner chaque enfant ? S’impliquer pour leur avenir, mieux : leur santé.
Oui, vous avez raison l’implication de la famille est importante, sans elle l’écart se creuse de plus en plus. Nous pensons que cela est aujourd’hui compris par l’institution mais il faut aussi des idées, des outils, du temps etc…Des erreurs on en fait tous, l’essentiel c’est de savoir les reconnaître à temps et par ailleurs nous connaissons plein d’enseignants hyper dévoués nous aussi!