Sandrine – Faut que je te dise : c’est mieux que tu commences finalement, que tu racontes ce que moi je devais dire au début… Puisque tu enchaînes juste après, c’est un gain de temps, tu vois. On n’a pas de temps à perdre !
Sylvie – Mais non, je vais pas faire ça ! C’est toi qui commences, on l’avait prévu comme ça !
Sandrine – Fais pas ta chochotte, regarde : 10 mots ! Tu vas pas me faire un coup de calcaire pour 10 mots ?
Sylvie – Bon. 10 mots… D’accord. « Aujourd’hui en France, l’école est obligatoire de 6 à 16 ans ». Ca fait 11 mots, non ? Je devrais y arriver. C’est vrai que c’est pas trop difficile.
Sandrine – Ah tu vois !
Fin de l’échange. Elle m’a eue…
Au fait, y’avait pas un truc dans l’air sur l’école dès 3 ans ? C’était pas dans les tuyaux ça ? Pfff… J’ai même plus le temps d’écouter la radio… Je l’avais entendu quelque part, ça c’est sûr ! Mais bon, c’était peut être avant des élections… Ils disent des tas de trucs chouettes avant les élections… Elle a dû vérifier. Si c’est 6 ans, c’est 6 ans.
C’est le moment, devant les maires du grand Châtellerault. Les maires et les mairesses… On dit ça « mairesses » ? Oui, sûrement. Enfin on le dit quand même pas souvent ! La vache ! Un parterre de chemises à carreaux. Variante : les rayures. Même Anne-Florence B a cru bon de mette un pantalon. Mimétisme ? Qui sait ?
Et je commence : « En France, l’école est obligatoire de 6 à 16 ans… »
Et là, des tas d’index s’agitent de gauche à droite, de droite à gauche, un va-et-vient impressionnant et unanime. Arrêt immédiat. Tétanisée, j’ouvre la bouche, écarquille les yeux : 1 2 3 soleil ! Comme un lapin dans les phares…
On m’aide : 3, 3, 3 ! J’entends bien la rumeur. Florence B, poussant l’étayage à son maximum, me montre ses 3 doigts… Et articule (sans le son) : TROIS ANS ! C’est TROIS ANS !!!
Eh voilà ! Rattrape ça toi ! Je ne sais pas comment j’ai fait pour me sortir de là… Sans doute pas de manière brillantissime. Mais bon, tant pis pour l’ego !
L’idée c’était de raconter à tous ces hommes de bonne volonté, (oui, je sais, à ces quelques femmes aussi !), notre projet de lutte contre l’illettrisme. Et on l’a fait ! Et à 47 d’un coup ! 47 ? 45 ? 42 ? Que voulez-vous, j’ai toujours été fâchée avec les nombres….