Lundi 1er juillet je pars au travail. Une journée presque comme les autres…
Aucune pression pour se préparer, c’est un lundi matin sans gestion des garçons : ils sont chez leur papa. Ah oui ! Mais j’avais presque oublié qu’aujourd’hui, dans ma vie d’enseignante spécialisée, c’est un jour important : celui où je rencontre mon supérieur hiérarchique pour faire un point sur le travail effectué cette année. Une version de conseil de classe, un peu comme lorsqu’on détermine le passage en classe supérieure avec félicitations, encouragements, le redoublement… ou rien. J’ai rédigé un bilan, j’ai compté les élèves que j’ai aidés et on échange sur l’efficacité de mon travail. Nous nous projetons pour l’année prochaine, qui chez nous commence en septembre. Bah oui, une particularité qu’on oublie.
Problèmes techniques en cascade
En parallèle mon téléphone ne cesse de vibrer c’est le Slack… Derrière ce nom d’oiseau, se cache en réalité notre outil de communication, avec toute l’équipe. Ah celui-là ! Il y a des jours où je l’adore et des jours où c’est un « cauchemar technologique ». Les mauvaises nouvelles se succèdent et je suis impuissante : Arthur devait installer la dernière version de Graphonémo pour l’interview de demain dans une école du bêta testing et rien ne va ! Julien l’assiste, démêle les choses et un nouveau nœud arrive. Ils ne semblent rien lâcher. Moi en tout cas je cache mon téléphone pour rester à ce qui est le plus important sur ces heures-là, mon boulot d’enseignante.
Le monde d’aujourd’hui va si vite
Repas au restaurant avec l’équipe et là le téléphone sonne. Non ! Non ! Je ne décrocherai, pas… Tout cela peut attendre.
Le monde d’aujourd’hui va vite mais il ne faut s’imposer que la cadence qu’on peut supporter… N’est-ce pas ?
On y retourne, l’après-midi passe. On travaille sérieusement : certaines écoles sur lesquelles j’intervenais sont confiées à d’autres professionnels. J’en découvre de nouvelles. 16h50 fin, de la journée.
Ah mais oui ! On est lundi, allez, on se dépêche ! Il faut récupérer les garçons, c’est le dernier cours de gym pour le cadet… J’ai oublié son sac de sport ! Je n’avais pourtant que cela à penser ce matin, franchement ! Ce n’est rien… Un aller-retour à la maison, ça passe dans le timing. Les garçons auront 10 minutes pour goûter avant de repartir. Ni une, ni deux, c’est ce que nous faisons. Il fait chaud et pourtant, ce jour-là, l’appétit est en faveur des tartines de la célèbre pâte à tartiner, plutôt que pour celui des gâteaux secs ou de la compote à boire qu’on peut facilement finir dans la voiture… Ils ont subitement envie de se faire un cocktail jus d’orange-limonade-sirop de grenadine… Et le goûter n’en finit pas… J’ai dû leur répéter cent fois de se dépêcher. Eux m’expliquent avec sérénité et la bouche pleine, que ce n’est pas parce que je le disais plusieurs fois qu’ils pourraient manger plus vite. En même temps, quand je regarde mon aîné sourire, je me rends bien compte qu’avec ses 4 dents perdues en deux semaines, ce que je lui demande est mission impossible !
Le rythme s’accélère
On finit par partir. On arrive à la gym avec une minute de retard et je repars à la maison avec mon grand, une minute pile poil avant le RDV téléphonique avec une personne de la BPI.
Au programme, discussion autour de la bourse French Tech qu’on peut essayer d’obtenir. Mais tout doit se faire dans les 48 heures sinon nous passerons à côté. Pffff ! Tant de projets et si peu de temps. Je prends note des documents à envoyer, des tableaux à remplir, le tout avec le générique des Schtroumpfs en fond sonore. Une maman exactement comme les autres parce qu’à un moment j’achète ma « tranquillité » par un dessin animé sur la tablette.
Et là… Mais non, c’est pas vrai ! Il est l’heure. L’heure de quoi ? D’aller chercher le plus jeune à son cours et surtout de partir au conseil d’agglomération.
La voie royale
Et voilà, je suis encore en retard ! Sylvie s’avance vers moi et je l’assomme avec les informations que je viens juste de recevoir. On s’assoit sur un banc. Laurence arrive, puis Julia. Je me rends compte que dans quelques minutes on y sera : 47 d’un coup. Après le bâton de pèlerin qu’on a pris depuis quelques semaines (surtout Sylvie d’ailleurs !), on nous offre une voie royale dans un lieu majestueux de Châtellerault, lieu que je ne connaissais même pas. La salle est splendide, lumière traversante, rénovation de belle qualité dans le respect du bâtiment original… On s’assoit. Je jette un coup d’œil rapide sur ce qu’on a prévu de dire ce soir et j’ai l’impression de tout redécouvrir. Tout est pourtant prêt depuis vendredi. On est lundi mais tellement de choses sont arrivées depuis que c’est le trou noir ! J’invite Sylvie à commencer le temps de rassembler mon esprit. Cela lui rajoute une ligne ou deux. D’habitude, elle est bavarde Sylvie.
On commence.
C’est pas vrai ! Je me rends compte que je l’envoie au casse-pipe… Une phrase toute bête, une petite phrase de rien du tout qu’elle doit prononcer à ma place… Mais qui est complètement fausse. Parce que non, l’école n’est plus obligatoire de 6 à 16 ans, à partir de septembre, elle l’est de 3 à 16 ans. Ce n’est pas passé inaperçu… Moment de solitude… Et puis la magie opère, ce projet on l’a dans les tripes et toute l’assistance le sent. 47 d’un coup…
Les citoyens de demain grandissent aujourd’hui
Je ne sais pas si les 47 maires de la communauté d’agglomération de Châtellerault étaient là, ni même s’ils ont tous applaudi. Mais une chose est sûre, c’est que toutes les personnes de la salle auront entendu ce lundi 1er juillet que notre projet est un joli projet, que nous sommes soutenues en local et que nous serions extrêmement fières de les associer à notre lutte contre l’illettrisme.
Ce moment est fort car il constitue un moyen d’avancer dans la commercialisation de notre produit et de nous faire connaître de nos cibles.
Une nouvelle porte s’est ouverte devant nous et la seule phrase écrite que je ne voulais surtout pas oublier de dire n’a pas franchi mes lèvres tout à l’heure. Elle m’est revenue, lorsqu’à 21h je suis allée embrasser mes enfants.
Les citoyens de demain grandissent aujourd’hui
Un des contes préféré de mes garçons, que je leur lis et relis sans cesse, est « Sept d’un coup ». Vous aurez sûrement compris le clin d’œil. Maman, enseignante et entrepreneuse : des journées à trois dimensions !